Ce mois-ci, nous partons à la rencontre de Bertrand Feraut, arboriculteur et maraicher bio implanté dans le Gard. L’histoire d’une famille de producteurs fermement engagée dans une démarche de respect de l’environnement et consciente des enjeux liés à la transmission générationnelle.
Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre activité ?
J’ai repris l’exploitation familiale en 1992. J’exploite aujourd’hui deux fermes à taille humaine, dédiées à l’arboriculture et au maraîchage, avec une équipe de 4 salariés permanents et l’équivalent de 5 saisonniers. J’ai converti mes terres à l’agriculture biologique en 2006.
Que produisez-vous ?
Ma première ferme est dédiée à la production de pommes 100% bio, certifiées Demeter et labellisées Bio Équitable en France. La seconde est consacrée à la culture de légumes : salades, persil, coriandre et épinards en hiver, et courgettes, concombres, tomates et melons au printemps-été, le tout certifié Naturland.
Quels modes de production utilisez-vous ?
En plus de respecter les critères de l’agriculture biologique, je produis mes pommes conformément au cahier des charges de la biodynamie et aux principes de l’agroécologie qui s’inscrivent dans la démarche du label Bio Équitable en France. Ces deux approches complémentaires sont centrées sur le respect du vivant et la durabilité des sols.
La notion de sol vivant est capitale dans nos modes de production. Nous travaillons la terre de manière à ce qu’elle soit la plus riche possible en matière organique. Pour cela, nous utilisons uniquement des amendements organiques nobles, riches en oligoéléments. Nous veillons aussi à ce que nos sols soient toujours couverts. Cela permet à la fois de capter un maximum d’azote et de favoriser la rétention d’eau. Tous ces éléments sont essentiels à la croissance et au développement des cultures.
C’est grâce à cette méthode que j’ai réussi à résoudre des problèmes récurrents liés à la production de pommes, notamment l’alternance des rendements d’une année à l’autre. Les pommiers ont retrouvé une stabilité dans leur production.
Nous avons également installé des haies brise-vent sur notre exploitation, une méthode d’agroforesterie qui a une double fonction : ces arbustes protègent nos fruits et légumes du vent tout en servant de support aux oiseaux qui sont des prédateurs pour les insectes.
En quoi ces approches vous permettent d’être plus résilient face aux aléas de la nature et aux conséquences du dérèglement climatique ?
Côté eau, nous sommes plutôt chanceux jusqu’à présent. L’exploitation se situe entre Nîmes et la Camargue, en connexion avec les Cévennes et le Massif Central. Donc nous bénéficions de nappes phréatiques abondantes. De plus, nous sommes sur le plateau de Costières qui est très caillouteux et agit comme une éponge.
Cependant, la chaleur croissante et le manque de froid en hiver représentent des défis majeurs. Pour y faire face, nous avons installé des filets d’ombrage sur les cultures de pommes. Nos serres servent quant à elles de régulateurs climatiques et protègent les plantes des excès de pluie ou de vent.
Pourquoi avoir choisi de s’engager dans une démarche de commerce équitable ?
Ça a été une évidence car je pratiquais déjà depuis des années une agriculture respectueuse des hommes et de l’environnement. Je fais partie d’une coopérative qui regroupe 52 producteurs à la tête de fermes familiales qui donnent des récoltes toutes l’année. Ce sont des cultures exigeantes et techniques qui nécessitent du personnel formé et qualifié, de manière permanente. Le label permet de valoriser le travail des paysans et de montrer qu’il est possible de faire vivre de petites exploitations tout en protégeant les sols et en offrant une rémunération juste aux agriculteurs.
Quels sont les enjeux de l’agriculture de demain selon vous ?
Bien que le monde paysan ait toujours su s’adapter, le rythme du changement climatique est aujourd’hui trop rapide pour que les agriculteurs puissent suivre sans soutien. Pour moi, la priorité numéro une est d’encourager et d’aider les jeunes à s’installer.
L’avenir de l’agriculture repose sur la multiplication du modèle paysan, familial et à taille humaine, où la protection des sols et le renouvellement des générations sont essentiels. Le modèle de commerce équitable montre qu’il est possible de conjuguer agriculture durable, respect de l’environnement et valorisation des savoir-faire locaux, tout en s’adaptant aux défis actuels et futurs.