Ce mois-ci, nous partons à la rencontre de Virginie Terrien, éleveuse de chèvres bio et productrice de lait bio, implantée dans le Maine-et-Loire. L’histoire d’un couple de producteurs profondément engagé dans une démarche de respect du bien-être animal.
Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre activité et exploitation ?
Je m’appelle Virginie Terrien, j’ai 43 ans, je suis mariée et mère de quatre enfants. Je travaille avec mon mari, qui s’est installé en 2008 en reprenant une exploitation de 54 hectares de vaches allaitantes et de volailles. Nous sommes établis au Puy-Saint-Bonnet, à côté de Cholet. Dès 2010, nous avons décidé de convertir la ferme en agriculture biologique. Puis, en 2015, je me suis installée à mon tour après avoir été salariée pendant plusieurs années.
Nous avons agrandi la ferme, qui fait aujourd’hui 95 hectares, dont seuls 30 hectares sont cultivables. Nous devions donc trouver une production plus adaptée à notre terrain riche en pâturages. C’est vers l’élevage caprin que nous nous sommes tournés en 2018. Après nous être formés et avoir construit notre chèvrerie de manière autodidacte, nous avons lancé notre production en 2021. Aujourd’hui, nous gérons notre exploitation de 350 chèvres avec l’aide d’un salarié à plein temps et d’un apprenti.
Que produisez-vous ?
Nous sommes spécialisés dans l’élevage caprin et la vente de lait de chèvre labellisé Bio Équitable en France. Nous fournissons ce dernier à la laiterie La Lémance, située à 15 km de notre ferme. Cette dernière le transforme ensuite en yaourt et en lait bouteille.
Quels modes de production utilisez-vous ?
Nous élevons nos chèvres et produisons notre lait dans une ferme à taille humaine (moins de 200 chèvres par éleveur), selon le cahier des charges du label Bio Équitable en France et celui du groupement de producteurs Lait Chèvres Bio-Ouest (LCBO) dont nous faisons partie.
Nous élevons tous nos animaux en systèmes de production Bio, respectueux de leurs besoins fondamentaux et dans un environnement adapté. Ils pâturent du colza au minimum 120 jours par an, du printemps jusqu’au début de l’été, et de septembre à mi-novembre pour les bonnes années. En parallèle, nous les alimentons avec du foin de pré, du foin de luzerne et du maïs grain que nous cultivons nous-même, ainsi qu’avec un complément de mélange céréalier. Les chevrettes, elles, sont nourries au lait des mères, au lait de vache bio ou à la poudre de lait bio. Nous sommes le seul groupement de producteurs qui s’engage à le faire.
En quoi ces pratiques vous permettent-elles d’être plus résiliente face aux aléas de la nature ?
L’élevage caprin demande beaucoup de rigueur. En répondant aux besoins fondamentaux de nos animaux (alimentation naturelle et durable, accès à l’extérieur, confort, hygiène, absence de stress…), nous renforçons leur bien-être et leur santé. Des chèvres saines sont moins susceptibles de tomber malades, ce qui réduit l’usage de médicaments comme les antibiotiques et les pertes de production.
Pourquoi avoir choisi de vous engager dans une démarche de commerce équitable ?
Nous avons été labellisés Bio Équitable en France en même temps que notre groupement de producteurs en 2021. En plus de reconnaître nos pratiques d’élevage et de production durables et respectueuses, le label permet de les valoriser économiquement auprès de magasins spécialisés comme Biocoop. C’est un moyen de vendre notre lait à un prix basé sur les coûts de production. En parallèle, LCBO assure une visibilité du prix du lait sur 3 ans. Nous pouvons ainsi garantir une rémunération juste et équitable à toute l’équipe.
Quels sont les enjeux de l’agriculture de demain selon vous ?
Pour moi, l’agriculture de demain doit avant tout devenir un modèle en matière d’écologie. Il est indispensable que le gouvernement prenne des mesures plus concrètes et durables pour nous accompagner. Actuellement, il n’y a pas de projets ou de dispositifs qui nous permettent vraiment de souffler ou de faire face sereinement aux défis de demain.
Nous subissons les aléas climatiques, sanitaires et économiques. Le soutien d’organismes comme Bio Équitable en France est nécessaire pour aider les exploitations à s’adapter et à rester viables dans un environnement de plus en plus incertain.
J’espère aussi que les distributeurs prendront davantage conscience que nos pratiques exigeantes ont un coût. Il est crucial que notre travail soit mieux reconnu et valorisé, notamment à travers une rémunération plus juste. C’est un point fondamental si l’on veut que les agriculteurs puissent continuer à vivre de leur métier.